Bons ou mauvais clients : quand la data s’en mêle ?
Les organisations sont de plus en plus vulnérables à la fraude – que cela soit par l’accroissement des nouvelles technologies, de plus en plus disponibles, par l’apport de données toujours plus important ou encore le nombre de sources démultipliées.
Comment les données peuvent permettre d’identifier et prévenir les activités frauduleuses ?
Quelles stratégies les organisations peuvent-elles mettre en place ?
Revenons sur l’échange qui a eu lieu récemment entre Michèle Legrand, Major Account Executive chez Snowflake, Stéphane Savalle, Fondateur AssurN’Co et FG2A et Alexandre Laverdure, Senior Account Executive chez Precisely pour y voir plus clair.
L’importance de la data dans le business model d’une organisation
On le sait, les données jouent un rôle primordial dans la prise de décision stratégique de chaque organisation. L’enjeu est conséquent : il faut parvenir à les localiser, les exploiter, les partager, les gouverner et les valoriser. Bien entendu, la mise en place de processus, entre autres, vous permettra de garantir la qualité de vos données et ainsi les rendre intègres pour une prise de décision stratégique efficace.
Quel que soit le secteur d’activité, les données vont accompagner les entreprises pour le positionnement, leur permettre de développer de nouveaux produits, services, plus adaptés et personnalisés. Cette clef pour l’innovation leur permettra ainsi de rester à la page, séduire une nouvelle clientèle mais aussi fidéliser celle existante. Comme précise Michèle Legrand « Il va être clef aujourd’hui de pouvoir connaître [ses clients] et avoir une vision 360 ». Plus vous en saurez sur votre client, mieux vous pourrez répondre, et même anticiper, ses besoins et attentes. Cela vous permettra également de vous positionner comme une entreprise à l’écoute de ses clients et avec un temps d’avance.
En se penchant sur le secteur des assurances, on ne fait que confirmer ces propos, notamment si l’on parle de la gestion des risques et des réclamations. « Apprécier un risque sans data c’est compliqué » nous confie Stéphane Savalle.
Dans les assurances, on observe beaucoup de data silotées notamment en raison des nombreuses fusions qui ont eu lieu. Ajoutez à cela le nombre important d’acteurs qui entrent en jeu et vous assistez à un réel éclatement de la data, présente en masse. Il faut ainsi garantir que cet ensemble de data sera correctement réconcilié mais aussi traduit pour que chacun des métiers puisse s’y retrouver et agir sur ses opérations. La question qui se pose est donc comment parvenir à mutualiser et plus précisément arrêter de gérer des contrats mais plutôt des personnes.
La fraude ? De quoi parle-ton exactement ?
Personne n’aime trop ce terme. Stéphane nous le décrit plutôt comme la capacité à identifier les « bons clients ». « Comment évaluer les personnes que j’aimerais avoir dans mes programmes en tant qu’assureur ? » C’est bien là une question qui n’est pas simple. Il ajoute même sa définition : « Une fraude c’est quelqu’un qui va chercher à avoir un bénéfice supérieur à celui qu’il devrait avoir en mettant des éléments dans sa déclaration qui sont soient erronés, soient gonflés ».
Quelques recherches sur le sujet nous ont permis de trouver des métriques intéressantes. Selon le site AR24, « en 2022, 20% des assurés ont reconnu avoir déjà fraudé afin d’éviter un malus ou une augmentation de leurs cotisations, ou encore pour bénéficier d’une meilleure prise en charge en cas de sinistre. »
Aujourd’hui, la fraude c’est une des préoccupations principales de tous ces acteurs car elle peut représenter jusqu’à 25% des charges sinistres, nous précise Stéphane Savalle. L’importance sera donc de parvenir à identifier et fixer quelle sera l’élasticité de chaque business model à cet impact pour définir le seuil « normal ».
Le défi des entreprises sera donc de trouver comment traduire opérationnellement ces données, pour établir le profilage des clients, afin d’identifier les « bons clients ». S’il est difficile de lutter contre la fraude professionnelle, en revanche, avec les bons outils, il est possible de détecter les risques de fraudes dans les déclarations en les croisant avec d’autres éléments/données (interne et – ou externe). Car il est important d’identifier justement les « bons clients » afin que ces derniers puissent bénéficier d’un parcours adapté à leur qualification.
Pourquoi a-t-on besoin de cette connaissance clients ?
Mieux connaitre ses clients est essentiel pour toute entreprise cherchant à prospérer dans un marché concurrentiel. En utilisant les données disponibles, les entreprises peuvent créer des profils clients détailles, ce qui leur permet d’adapter leurs offres et de personnaliser leurs communications.
Comme l’a souligné Alexandre Laverdure « une bonne gouvernance en matière de données est cruciale pour tirer parti de son patrimoine de données ».
Cependant la collecte et l’utilisation de données clients sont également soumises à des réglementations, telles que le RGPD. Ces normes peuvent être perçues comme des contraintes, mais elles peuvent aussi être vues comme des opportunités, pour renforcer la confiance des clients et démontrer un engagement envers la protection des données personnelles.
En intégrant une approche éthique et conforme aux réglementations, les entreprises peuvent non seulement mieux connaitre leurs clients, mais aussi établir des relations durables et bénéfiques pour toutes les parties prenantes. « Dans ce monde digital, il est important d’avoir un label confiance pour les clients » insiste Stéphane Savalle.
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Créer un écosystème de données enrichi et évolutif
Dans le monde des données, la collecte de jeux de données complexes représente un défi majeur. Il est crucial de se demander comment les traiter et les utiliser efficacement tout en veillant à ce qu’elles restent à jour, précises et cohérentes. Comme l’a souligné à juste titre Alexandre Laverdure, « une personnalisation basée sur des données obsolètes pourrait avoir l’effet inverse escompté », nuisant ainsi à la relation avec les clients.
Une fois ces données rassemblées, elles forment un écosystème complet et enrichi, pouvant être complété par d’autres données internes ou externes. Ce réservoir de données servira de base pour créer des profils clients précis. La mise en place d’un nuage de points permettra une évolution progressive de la vision du portefeuille clients, permettant ainsi une analyse approfondie de leur comportement et de leurs préférences.
L’objectif principal est de simplifier le travail et de mieux cibler les “bons clients”. Il est également important de mettre en place un modèle de gouvernance et de tracking pour le suivi des données, ainsi qu’une chaîne opérationnelle de validation pour assurer leur qualité.
En parlant d’enrichir les données, une question se pose : doit-on se limiter à nos propres données ou peut-on également rechercher des sources externes ? Une anecdote intéressante, rapportée par Michèle Legrand, met en lumière l’importance de cette approche. Par exemple, lors d’une déclaration de sinistre automobile, on peut vérifier les données météorologiques pour valider les circonstances de l’incident. En cas de suspicion de fraude, une intervention humaine peut être nécessaire pour approfondir l’analyse.
En somme, la gestion intelligente et éthique des données, en s’appuyant sur un écosystème complet et en incluant des sources externes pertinentes, permettra de mieux comprendre les clients, d’améliorer les services offerts et de garantir une expérience de qualité.
Les nouvelles technologies peuvent-elles aider à ce meilleur usage des données ?
Dans un monde où les données sont devenues un atout inestimable, les nouvelles technologies se révèlent être des alliées de choix pour optimiser leur utilisation. L’objectif de toutes les entreprises est de permettre à leurs équipes de devenir “polyglottes en termes de data”, ainsi que le souligne Michèle Legrand. Cette vision repose sur une idée simple mais puissante : chaque membre de l’entreprise devrait être capable de comprendre l’ensemble des données disponibles et d’en saisir leur potentiel. C’est là que les solutions clefs en main jouent un rôle essentiel, en répondant aux besoins à la fois des équipes IT et des métiers.
L’intelligence artificielle (IA) et l’apprentissage automatique (machine learning) occupent également une place de choix dans cette quête d’efficacité. Elles peuvent agir comme des soutiens en proposant une première analyse de type industrielle et automatique. Grâce à ces avancées technologiques, l’humain peut gagner en temps et en efficacité, lui permettant ainsi de se concentrer sur la seconde partie de l’analyse, celle qui apporte une valeur ajoutée plus importante.
En combinant les compétences humaines avec les possibilités offertes par l’IA et le machine learning, les entreprises peuvent créer des équipes performantes et agiles, capables de tirer le meilleur parti des données. Cette synergie permet non seulement d’améliorer les processus internes, mais aussi de prendre des décisions plus éclairées et stratégiques pour l’avenir de l’entreprise. Les nouvelles technologies ouvrent ainsi la voie à un avenir où les données deviennent une source de compétitivité, d’innovation et de croissance durable.
Et demain ?
La transformation digitale passe aussi par une redéfinition des métiers. Dans les sociétés silotées, les métiers sont tributaires et se tournent vers l’IT pour accéder aux données qui leur sont clefs et nécessaires. Alexandre Laverdure nous l’évoque « il y a un réel besoin de changement dans la vision des entreprises, c’est bien de dire qu’on est data-driven mais cela ne veut pas dire que c’est seulement à l’IT de s’occuper de la data. »
Afin d’alléger cette démarche et ainsi gagner en efficacité, il convient de penser à donner plus de responsabilités aux métiers sur les données. Le rôle évolue et permet aux métiers d’entretenir et enrichir les données pour qu’elles soient les plus à même de répondre à leurs besoins opérationnels.
Cette transformation des métiers se fait à plusieurs niveaux que cela soit en termes de connaissance ou encore de management et offre une flexibilité certaine aux entreprises. Cette conduite du changement doit être orchestrée de main de maître avec en grandes lignes : une sensibilisation globale à la data, la mise en place d’une dynamique évolutive (par rapport aux clients, à la technologie ou encore à l’organisation dans son ensemble) et une collaboration entre les départements.
« Demain cela ira encore plus vite, une entreprise doit se pencher dessus mais il faut savoir que vais-je faire de ces données, comment je vais orienter mon entreprise par rapport à ça sur l’ensemble des facettes ? » ajoute Stéphane Savalle.
Finalement, comme conclut Alexandre Laverdure « nous sommes partis d’un mot « la fraude » qui faisait peur à tout le monde pour se rendre compte finalement que c’est plutôt une démarche collaboratrice aussi bien avec l’interne qu’avec ses clients. »
Au-delà d’aider à détecter la fraude, les données sont aussi clefs pour pouvoir justement proposer aux clients une offre plus complète, plus adaptée mais aussi des services complémentaires qui leur donneront envie de rester fidèle et « de ne pas céder à ce pas de côté ».
Pour voir le replay de cet échange.